Lettre Ouverte du Conseiller Territorial Jules Charville Adressée au Président Alain RICHARDSON Et Aux Membres Du Conseil Territorial De Saint-Martin.

Monsieur le Président
Mesdames et Messieurs les Vice-présidents
Mes chers Collègues,
Mesdames et Messieurs

Par le biais de cette lettre ouverte, je m'adresse à chacun des responsables politiques (élus) que nous sommes devenus grâce au suffrage universel, grâce aux votes de la population saint-martinoise. Mais, une fois n'est pas coutume, et ma requête au travers de ces quelques lignes, concernera d'avantage les pères et les mères de famille que nous sommes dans notre vie de tous les jours car, l'heure est grave.
A l'occasion du deuxième tour de l'élection présidentielle de mai dernier, la majorité des français élisait François Hollande Président de la république. La population Saint-martinoise qui a naturellement pris part au vote, a démocratiquement et majoritairement, voté Contre Nicolas Sarkozy et pour François Hollande mais certainement pas exclusivement pour la 31ème proposition de son programme.
L'actuel projet de loi gouvernemental qui est porté et farouchement défendu par la Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, Madame Christiane Taubira-Delannon, et qui vise à étendre l'institution du mariage aux couples de même sexe, est une idée précisément ahurissante dans la fabuleuse histoire des civilisations humaines.
Et même si le chômage défait le tissu social, accable notre jeunesse, même si la violence et la délinquance juvénile se postent partout dans nos quartiers, même si notre économie est de plus en plus moribonde, et comme si cela ne suffisait pas, le Gouvernement français a obstinément décidé de déchirer un peu plus la France et les territoires d'Outre-mer qui la composent.
Le projet de loi qui ouvre le mariage aux couples de personnes de même sexe a été présenté par la ministre de la justice au Conseil des ministres du mercredi 7 novembre 2012 dernier, et doit être examiné par le Parlement (Assemblée Nationale et le Sénat), à partir du 29 janvier prochain.
Mais Monsieur le Président, mes chers collègues, de quoi s'agit-il concrètement pour nous autres Saint-Martinois qui sommes profondément attachés aux valeurs chrétiennes et au respect de la famille avec un grand ''F''?

  • Le projet de loi donne aux personnes de même sexe le droit de se marier et donc d'adopter des enfants
  • Cette loi vous obligera, Monsieur Le Président, ou vous Madame la 1ère Viceprésidente, à célébrer à Saint-Martin et dans les locaux de l'Hôtel de la collectivité, un mariage entre deux hommes ou entre deux femmes !!!
  • Et Vous Monsieur le 2ème Vice-président, vous remettrez à ce couple un Livret de Famille qui portera la mention de « Parents » et non plus de « Père et Mère »
  • Et par ailleurs, le projet de loi ouvre aux personnes de même sexe mariées la voie de l'adoption et de la PMA (Procréation Médicalement Assistée).

Selon la Constitution Française, dans le temps et dans l'espace, La loi française a force obligatoire dans le cadre territorial qu'elle vise et elle a normalement vocation à s'appliquer
sur l'ensemble du territoire sur lequel s'exerce la souveraineté française.
Puisqu'une loi nouvelle est généralement meilleure que la précédente, son applicabilité est donc immédiate. Cependant, il y a un risque de léser des intérêts légitimes.

Mais où allons-nous ? Jusqu'où irons-nous ?
Dans le cadre de cette affaire, je me fais fort d'être l'écho d'une grande partie du peuple saint-martinois qui se demande encore une fois, MAIS QUE FONT NOS ELUS LOCAUX ? ET A
QUOI SERVENT REELLEMENT NOS DEUX PARLEMENTAIRES ?
Ainsi chers collègues, vous l'aurez compris : Notre collectivité n'est pas épargnée et c'est là, la raison de cette lettre ouverte, c'est aussi là, tout le sens de mon combat depuis toujours.
Ce projet de loi nous pose trois problèmes majeurs.

Premièrement,
Le projet de loi touche au coeur même de notre civilisation et pour Saint Martin, plus spécifiquement, à la sensibilité religieuse profonde qui existe au sein de la population saintmartinoise; elle touche au principe sur lequel est fondé l'institution du mariage construite anthropologiquement sur l'union de l'homme et de la femme.
la loi dissout d'un point de vue anthropologique une distinction essentielle qui fonctionne dans l'ensemble de nos sociétés et qui jusqu'à aujourd'hui est porteuse de nombreuses
valeurs positives de nos vies.

Deuxièmement,
Si nous reconnaissons absolument le droit de toute personne à avoir la vie sexuelle de son choix et considérons cette règle comme une règle sacrée pour toute société respectueuse
des droits de l'homme, la suppression au sein de l'institution du mariage de la différence des sexes et de la distinction Homme/femme nous semble poser de vrais et graves problèmes qui touchent au fondement de notre société et dont le premier est d'ordre éthique et psychologique, pour nous saint-martinois.
La dissolution des différences dans l'institution du mariage , comme l'ont mis en evidence des spécialistes, pose la question du droit de l'enfant à avoir un père( male) et une mère (femelle) quelque soit le statut juridique du couple de ses parents.
C'est au nom de ce droit qui concerne les générations à venir que nous entendons faire entendre notre voix saint-martinoise.

Troisièmement,
Ce projet de loi pose enfin un problème éminemment politique, car on considère cette évidence que le mariage en tant qu'institution n'est pas prioritairement ordonné à la satisfaction des individus mais au bien commun de la société.
Aborder la définition du mariage sous le seul angle d'un prétendu « droit au mariage » c'est en dénaturer le sens.
La société Saint-martinoise est en crise et souffre déjà de tous les maux. Notre population et plus particulièrement notre jeunesse manquent de repères fondamentaux, ne connaissent pas les "valeurs", qu'elles soient nationales, patrimoniales, culturelles ou morales.
Pour ma part, et puisqu'il y va de ma responsabilité d'élu local, je ne puis accepter que cette loi qui représente un vrai danger pour notre peuple, soit promulguée et s'applique sur le territoire de Saint-Martin sans la combattre vaillamment, sans mettre tout en oeuvre pour faire savoir au gouvernement français qu'une grande majorité de la population saint-martinoise que nous représentons ici et à Paris, y est donc hostile.
Il est donc de notre devoir en tant que responsables politiques élus, soucieux de l'intérêt général de celles et ceux qui nous ont choisis, et avec l'appui du CESC, d'interpeller et de mandater officiellement nos deux parlementaires Daniel Gibbs, (Député de la 1ère Circonscription de St-Barthélemy et de St-Martin), et Louis-Constant Fleming, (Sénateur de St-Martin), à réagir fermement, à porter le message au Parlement, au nom du Conseil Territorial, pour réclamer auprès du gouvernement, le retrait pur et simple de ce projet de loi d'une part, et d'autre part, à faire valoir le « Principe de la spécialité législative », afin que cette loi ne soit pas applicable dès facto sur le territoire de notre Collectivité d'Outre-Mer, même si il s'agit-là d'un cas de « Droit civique » et de « Garanties des libertés publiques ».
En effet, par le biais de l'article 76 de la Constitution du 4 octobre 1958, dans sa rédaction d'origine, les territoires d'outre-mer ont conservé le bénéfice de la spécialité législative que l'article 74 révisé (74-1) par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a expressément conforté.
En ces circonstances, dans la suite logique de mon intervention à l'occasion de la réunion du Conseil Territorial du jeudi 17 janvier dernier, et avec le concours de tous : (le DGS, service juridique de la COM, l'épiscopat, fédération des églises, le CESC, les associations de défense des droits de l'enfant et de la famille, l'association des parents d'élèves, etc.), je propose donc qu'un texte de délibération en bonne et due forme soit rapidement préparé et adopté par notre assemblée en ce sens.

Je vous remercie.
Jules Charville,
Conseiller Territorial